Belvoir (25) : un zoo au château

Belvoir (25) : un zoo au château

Messagepar Philippe » Dimanche 28 Juin 2015 17:05

Patrie du peintre naturaliste Jouffroy, l’édifice du Moyen Âge accueille pour l’été les huiles et gravures d’un autre artiste, Gaston Chopard, passionné par les animaux sauvages.

Gaston Chopard (1883-1942) avait une santé délicate, des poumons, semble-t-il, fragiles. Ce Parisien, qui aurait aimé voyager, n’est du coup que rarement sorti de la capitale. Autant dire que l’Afrique et ses merveilles lui étaient totalement inconnues. Et pourtant ! À regarder les cimaises de la salle Béatrix de Cusance, au château de Belvoir, le visiteur a presque l’impression de partir en safari : ici, une antilope bondissante, là une hyène patibulaire, plus loin un hiératique hyppotrague et, trônant tels des sages, des éléphants majestueux. Le trait est précis, les attitudes saisissantes de véracité.

Et pour cause. « Chopard passait son temps au jardin des plantes à Paris. Il observait avec énormément d’attention tous les animaux », raconte Christian Jouffroy, actuel propriétaire, avec ses sœurs, du château, perché sur les hauteurs entre Montbéliard et Besançon. « C’est amusant : il n’a représenté, en tout cas dans les pièces que nous possédons, que des bêtes sauvages. Aucun animal familier,»

Modernes éléphants

Depuis une quinzaine d’années, le château de Belvoir accueille durant la période estivale une exposition. Histoire de renforcer l’intérêt d’une visite de cet édifice dont les premières pierres datent de 1224 (une inscription, rarissime puisqu’il s’agit de chiffres arabes, en atteste) et qui a été entièrement rénové par la famille du peintre Pierre Jouffroy, qui l’avait acquis en 1956.

Artiste très reconnu, naturaliste, spécialiste de Courbet et défenseur acharné du patrimoine, le Franc-Comtois était aussi un collectionneur passionné. « Mon père a toujours acheté beaucoup de tableaux des autres », poursuit Christian Jouffroy. Là, en l’occurrence, il s’agit d’un don ; l’épouse de Chopard, d’ascendance comtoise, a offert plusieurs œuvres ici exposées donc, au peintre de Belvoir. « Avant la première guerre mondiale, Chopard était très actif, il évoluait dans le milieu artistique parisien, aux côtés de Braque, Picasso, Bonnard… Toute sa vie, il a vécu de son art, même s’il faisait son chemin tout seul, assez indifférent aux modes. Mon père l’a rencontré dans les années 30 à Paris par l’intermédiaire d’un critique d’art. Il était très sensible à sa manière de styliser l’animal. »

Originalité : Chopard était graveur sur bois. À Belvoir, les huiles (quelques portraits et scènes) côtoient donc cette dernière technique qui donne de superbes réalisations pour la plupart en noir et blanc. Les « colorées », tout aussi superbes, sont consacrées aux oiseaux, perroquets flamboyants et hérons pleins de grâce. Aquarelles et même un livre pour enfants complètent l’expo. Dont le clou reste, pour nous, le fameux trio d’éléphants, étrange croisement artistique entre « Picasso et Messagier ». « Pour ma part, je suis épaté par le fait qu’il s’accommodait de petits sujets comme des grands : c’est un peintre sans format défini a priori, avec une très belle façon de composer », poursuit Christian Jouffroy.

Tombé dans l’oubli, malgré une présence au musée d’art moderne de Paris et dans une galerie, le bestiaire de Chopard retrouve donc une nouvelle vie en terres comtoises. Il prend, à Belvoir, la suite d’une exposition sur celle qui fut une des maîtresses des lieux, Béatrix de Cusance, dont le portait signé Van Dyck est encore visible dans une des chambres. À noter qu’une gigantesque maquette du château (2m50 de haut), réalisée par les collégiens de Sainte Jeanne-Antide à Sancey, orne depuis peu la grande salle : elle célèbre, un peu à l’avance, les 60 ans d’occupation et de restauration du château par la famille Jouffroy.

Château ouvert tous les jours en été de 10 h à 11 h 30 et de 14 h à 17 h 30, visites guidées. Entrée : 6 € à partir de 12 ans.

Image
Un livre pour enfants, magnifiquement illustré et détaillé, a été réalisé par Chopard dans les années 30.
Source : L'Est républicain.
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