La cupidité passe avant la conservation...

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La cupidité passe avant la conservation...

Messagepar Le Fossa » Mardi 09 Mai 2006 12:51

Une société française exploite cet arbre rare, pourtant au centre de la vie des villages locaux.

L'est du Cameroun privé des fruits du moabi

par Fanny PIGEAU
QUOTIDIEN : samedi 06 mai 2006

Mindourou (Cameroun) envoyée spéciale

Jour de paie, ce samedi, pour les 400 employés de la société forestière Pallisco, dans la petite localité de Mindourou, à 300 km à l'est de Yaoundé. La bière coule à flots, la musique s'échappe des bars jusque tard dans la nuit. Des habitants, pourtant, font grise mine : ils ne pardonnent pas à l'entreprise d'avoir abattu, en 2005, trois moabi dans leur «forêt communautaire».

L'affaire peut sembler dérisoire. En réalité, elle est symptomatique des problèmes récurrents posés par l'exploitation du moabi, activité dont la société Pallisco, filiale du français Pasquet, est le leader au Cameroun. En toute légalité car l'arbre ne dispose d'aucune protection particulière. Utilisé en Europe pour fabriquer portes, fenêtres ou parquets, cet arbre, le plus grand du continent africain, est aussi très prisé par les communautés locales : pour elles, il représente une valeur économique et sociale importante. «C'est avec les fruits du moabi que nous fabriquons notre huile et nos médicaments. Quand un moabi est coupé, nous perdons beaucoup», explique un habitant.

Dans cette région forestière, difficilement accessible (seul un tiers de la route entre Yaoundé et Mindourou est bitumé), la chasse et la cueillette ont longtemps été les principaux moyens de subsistance.

Fraude. Mais, avec la présence de Pallisco, implantée depuis le début des années 70, rien n'est plus comme avant. Dans plusieurs villages qui bordent la concession forestière de la société, les gens se plaignent. Un jour, ils ont vu débarquer les engins de la société venus couper des arbres qu'elle avait pourtant promis de préserver. Les habitants de Zieng Onoul, par exemple, accusent Pallisco d'avoir frauduleusement coupé onze moabi, dans leur forêt, en 2000. Ceux de Nemeyong attendent toujours que la société leur donne des explications, voire une indemnisation pour trois arbres abattus à la fin des années 90 (la valeur de ces trois arbres sur le marché européen est évaluée à environ 9 000 euros). Autour de la localité de Medjoh («moabi» en badjoué, la langue locale), une soixantaine d'arbres auraient été abattus en 2000. «Ils en ont coupé à moins de 1 kilomètre de la route alors qu'ils avaient promis de ne pas le faire à moins de trois kilomètres, rapporte une habitante. Nous avons voulu arrêter les machines. Finalement, c'est le chef du village qui a été condamné à trois ans de prison avec sursis ! Quand on est face à une société qui a de l'argent, que peut-on espérer d'autre ?»

Avec ces arbres, des femmes ont perdu leur unique source de revenus. «L'une d'entre elles nous a expliqué que l'argent de la vente d'huile de moabi lui permettait d'envoyer ses filles à l'école. Depuis que Pallisco a coupé les moabi, elle n'a plus les moyens de le faire», raconte Belmond Tchoumba, de l'ONG les Amis de la Terre au Cameroun. Aujourd'hui, pour trouver des arbres, il faut s'enfoncer très loin dans la forêt. «C'est très pénible, rares sont les femmes qui le font.»

Désabusés. «Nous sommes toujours critiqués. Mais personne ne souligne ce que nous faisons de positif. Personne ne parle, par exemple, de nos plantations et de la pépinière que nous avons créée», répond Loïc Douaud, chef du site Pallisco de Mindourou. Une pépinière ? Les habitants pygmées de Dinpam, près de Medjoh, haussent les épaules, désabusés : «Il faut plusieurs années avant qu'un arbre soit productif. En attendant qu'il pousse, comment fait-on pour vivre ?» On estime qu'un moabi commence à produire des fruits de manière régulière à 90 ou 100 ans.

«90 % des vieux moabi en âge de fructifier sont abattus, ce qui risque d'entraîner la disparition locale de cet arbre», estime Sylvain Angerand, de l'association les Amis de la Terre en France. Dans un rapport publié hier, il rappelle que Pallisco, partenaire du Fonds mondial pour la nature (WWF), a bénéficié du soutien financier de l'Agence française de développement. «A ce titre, la société civile française est en droit d'exiger l'exemplarité. Or la surexploitation du moabi et les conflits avec les populations qu'elle provoque semblent être en contradiction avec l'objectif prioritaire de la coopération française, qui est la réduction de la pauvreté».


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