Pour être soigneur au zoo, mieux vaut avoir de bonnes chaussures, un couteau qui coupe, avoir confiance en la cage du lion et ne pas craindre les griffes des perroquets….
« Ah chouette de l'aide ! » Au moment de couper bananes, carottes et tomates en dés microscopiques pour les maki varis, Émilie Limbert ne peut cacher sa joie. Pour la soigneuse du zoo de Pessac en charge des fauves, le contre-la-montre débute à 7 h 45 chaque matin. Le rituel est immuable. Dans la cuisine centrale, la chambre froide recèle le festin des pensionnaires du zoo. La veille au soir, la jeune trentenaire a pensé à mettre à décongeler poussins, poissons et poulet.
Sous le couteau, qui ne coupe pas vraiment, il faut tantôt faire des petits bouts pour les petites pattes de chiens des prairies, tantôt des gros bouts pour capybaras. Les gestes des soigneurs sont automatiques.
Chaque mois, 220 kilos de poisson, 450 de viande et 1,2 tonne de fruits et légumes sont écoulés. Les supermarchés Leclerc de Pessac et Carrefour de Bègles donnent gratuitement leurs invendus et produits périmés. « On en nourrirait des gens avec tout cela », lâche Émilie.
Une centaine de cadenas
On parle, on parle, mais l'heure tourne. Les seaux, selon un équilibre très précaire, s'empilent dans les carrioles garées devant la cuisine. Celui qui voit une de ses gamelles se renverser et s'écraser au sol doit faire un gâteau pour le lendemain. Sur le rebord de la fenêtre, un paquet de Blédine. Son goût sucré aide à faire passer les médicaments. Le chat du zoo, Minette, passe par là. L'odeur des poissons dans les seaux ne la titille même plus.
Vite, il est presque neuf heures, le parc ouvre dans une demi-heure et il faut aller nourrir les bêtes.
Dans les mains, un trousseau de clefs à faire pâlir d'envie un gardien de prison. Le sésame pour ouvrir une centaine de cadenas que manipule deux fois par jour la soigneuse. Il faut désormais prévenir Arthur, son binôme. Dire dans quelle « loge » on entre et pour combien de temps.
Les règles de sécurité sont strictes. Chaque manquement est une faute professionnelle comme le rappellent les nombreux panneaux, qui affichent également les numéros d'urgence.
Derrière les judas, les panthères, les guépards, les tigres et enfin les lions, s'ébrouent et tournent en rond dans leur dortoir aux grilles que l'on espère solides. Ils ne sont nourris que le soir, en public. Après avoir fait le tour de l'enclos, pelle et râteau en main, les fauves sont lâchés. Les « loges » sont ensuite nettoyées.
À ce rituel s'ajoute tout l'inattendu. Le guanaco qui a une inflammation à l'œil et qu'il faut intercepter pour les soins, la nouvelle louve à crinière qu'il faut acclimater à son enclos.
11 h 30, les visiteurs se pressent au spectacle de perroquets. Les griffes des aras que l'on porte dans l'arène se plantent dans les bras. Émilie reprend les choses en main. Elle seule, ou presque, sait faire conduire une voiture miniature à un perroquet…
Source : Sud-Ouest.