Les panneaux sont toujours là, en bordure de la route de Bayonne. Mais la Pinède des singes, à Labenne, ne rouvrira pas comme prévu pour les vacances de Pâques. La société a été placée en liquidation judiciaire, mercredi dernier, par le tribunal de commerce de Dax. Et ce après avoir fait l'objet, depuis la fin du mois de janvier, d'une mesure de suspension administrative d'activité par arrêté préfectoral.
La période d'hivernage, pendant laquelle le parc animalier - qui accueille en plein air des macaques de Java - n'est pas ouvert au public, n'a de toute évidence pas permis une remise aux normes de sécurité et d'hygiène en vigueur pour ce type d'établissement. Les nombreux manquements relevés par l'acte administratif exigeaient sans doute des investissements trop lourds à supporter.
Divagations, évasions
Rarement d'ailleurs avait-on vu arrêté préfectoral aussi détaillé, faisant état de nombreuses visites d'inspection depuis 2011, des arrêtés de mise en demeure, des rapports à la DDCSPP (Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection de population). C'était par rapport à un singe perdu, vu près du pont de l'autoroute en juillet 2012, des divagations signalées à Saint-Martin-de-Seignanx et Ondres en 2012 et 2013, des évasions de macaques en 2015, et même la morsure d'une visiteuse en août 2015 ayant fait l'objet d'une plainte à Toulouse.
Sur l'équipement lui-même, l'arrêté détaillait une structure inadaptée, contrevenant aux règles de sécurité et décrivait un effectif chroniquement insuffisant pour permettre une exploitation sécurisée de l'établissement. L'inspecteur de l'environnement a constaté, le 8 octobre 2015, que les programmes de surveillance des différentes maladies auxquelles sont sensibles les macaques de Java, ainsi que les mesures de prophylaxie de ces maladies n'avaient pas été mises en place sur les macaques, etc.
Le gérant, Sébastien Lavignotte, avait fait appel de cette décision devant la juridiction administrative contestant de nombreux griefs qui lui étaient reprochés.
De 50 à 156 macaques
Cette liquidation judiciaire, intervenue depuis une semaine, constitue très certainement un crève-cœur pour le gérant que nous avons tenté de joindre à plusieurs reprises et qui devait nous expliquer son point de vue. Il avait repris cette société en 2003 (elle avait été créée en 1987) et s'était passionné pour cette activité hors du commun : proposer sur un parc en pleine nature, des balades ombragées entre les pins à la rencontre des macaques de Java, pour observer leurs comportements, leurs facéties, en toute liberté. L'endroit était cité comme une des attractions touristiques les plus originale de la Côte sud.
Le gérant a-t-il mal maîtrisé l'évolution démographique de la population de singes ? L'arrêté préfectoral qui avait autorisé la création de cet établissement portait sur une cinquantaine d'individus. Dernièrement, il y en avait 156, sans que la structure ait, selon les constatations faites par l'administration, évolué pour s'adapter à cette croissance. Ceci posant des problèmes d'accueil pour des animaux, et contrevenant aux règles de leur bien-être.
Des conditions, toujours, si l'on en croit les différents rapports émis, qui conduisaient à des comportements d'agressivité chez les animaux. Un état de fait qu'avait visiblement contesté le gérant des lieux, qui en début d'année expliquait s'être entouré de spécialistes, et avait une autre conception de l'accueil dans ce type de structure.
16°C en hiver
L'administration, elle aussi, s'était entourée d'expertises, comme on peut le lire dans l'arrêté. À l'issue de plusieurs visites, il avait été constaté qu'un quart des singes vivait dans des volières non protégées des intempéries. Et de citer le docteur vétérinaire Rigoulet, ingénieur au Museum national d'histoire naturelle et membre de la Commission nationale consultative pour la faune sauvage captive, qui préconisait un hivernage de l'espèce macaque de Java à une température minimale de 16 °C, en abri chauffé. Et que compte tenu des conditions climatiques observées dans la commune de Labenne, l'absence de solution d'hivernage adaptée à la détention et à l'entretien de 156 macaques de Java exposait ces animaux à un risque majeur pour leur bien-être et leur sécurité.
Du côté de l'administration, on exclut en tout cas avoir baissé le couperet de façon abrupte, mais au contraire, avoir tout fait depuis des années, non seulement pour alerter le gérant sur la nécessité de se mettre aux normes, mais aussi pour l'accompagner dans ses démarches et avoir fait preuve de la plus extrême patience. L'arrêté de suspension d'activité n'ayant été motivé que par le souci de protection des personnes et le bien-être animal. Triste épilogue.
Source : Sud-Ouest.