mauvaise nouvelle pour ce petit hippo
Bâle: le bébé hippo finira-t-il dans l'assiette des lycaons?
«Farasi», le bébé hippopotame, est né le 6 novembre dernier au zoo de Bâle. Il est ici avec sa maman «Helvetia», née en 1991 au zoo de Zurich. Le papa, «Wilhelm der Grosse», né en 1990 au zoo d'Hanovre, n'est pas sur la photo, car la mère craint une saute d'humeur de ce mâle exclusif
Le dernier-né hippo du zoo de Bâle, le petit «Farasi», est de trop. Il pourrait finir prématurément son existence en servant de nourriture pour les carnivores des autres enclos
La vie est un combat de tous les instants. C'est vrai dans la jungle, et ça l'est aussi pour le bébé hippopotame qui vient de naître à Bâle, dans un enclos cinq étoiles. Le petit «Farasi» («cheval» en langue swahili) n'est pas sorti du ventre de sa mère que les heureux responsables du zoo se sont mis en quête d'une place d'accueil pour le gros bébé (50 kilos à la naissance).
«Un animal surnuméraire»Car «Farasi» appartient à ce qu'on appelle pudiquement les «animaux surnuméraires». C'est dire qu'il ne pourra pas rester longtemps ici. «Nous pouvons accueillir un mâle et une femelle, et momentanément un petit», dit la porte-parole Tanya Dietrich.
Comme «Farasi» est un garçon, sa situation de «cheval du fleuve» en quête d'enclos est encore plus problématique qu'elle a pu l'être pour ses cinq grandes soeurs, «Tuma» (née en 1996), «Victoria» (1998), «Yala» (2001), «Asita» (2003) et «Chimala» (2005).
Ce papa si exclusifD'abord parce que son père, «Wilhelm der Grosse», est un hippopotame exclusif qui va bientôt regarder son rejeton de travers. «Il supporte moins longtemps un enfant mâle qu'une fille. Il n'acceptera plus ce petit qu'il va ressentir comme un concurrent dès que sa femelle «Helvetia» se retrouvera en chaleur, d'ici à deux ans», explique Tanya Dietrich.
Poussé plus vite hors de l'enclos natal que ses soeurs, «Farasi» aura encore plus de difficulté qu'elles à se recaser, puisqu'il ne peut y avoir qu'un seul mâle par enclos. En revanche, ce gros macho cohabite volontiers, quand il y a la place, avec plusieurs femelles.
Autant dire que l'existence du petit «Farasi» est hypothéquée. «Si nous ne trouvons pas une bonne place pour lui, il peut être euthanasié et mangé par les autres animaux du zoo», précise Tanya Dietrich. En l'occurrence, ce sont les grands carnivores, par exemple les lycaons, qui le verraient arriver dans leur assiette.
Un miracle possible?A Bâle, deux bébés lions et de jeunes autruches ont notamment connu ce sort funeste. Trop cruel? «C'est ainsi que fonctionne la chaîne alimentaire, répond Olivier Pagan, directeur du zoo. Pourquoi devrions-nous tuer des vaches supplémentaires, qui sont aussi des animaux méritant tout notre respect, pour nourrir nos carnivores, alors que nous avons un animal surnuméraire?»
Reste au petit «Farasi» à espérer un miracle. Ça arrive, pourrait lui dire sa grande soeur «Yala». Dans son cas, le coup de pouce du destin a pris la forme ronde et jaune d'une balle de tennis, lancée par un garnement de Dublin dans l'enclos des hippos irlandais. Une femelle avait alors croqué la balle et était morte de gourmandise. Du coup, «Yala» avait obtenu son billet d'avion pour Dublin, où elle avait été rebaptisée «Heidi», en souvenir de ses origines bâloises.
Manger, c'est aussi un combatMais, pour l'instant, «Farasi» ignore la menace et mène son premier combat pour la vie. Il cherche à manger, et ce n'est pas une mince affaire. Car il faut mériter sa tétée, d'abord en plongeant courageusement dans un bassin d'eau froide. Ensuite, le bébé hippopotame doit apprendre à retenir sa respiration et à s'orienter dans une eau sombre et trouble, pour retrouver les tétines de maman. «Heureusement, «Helvetia» l'aide en se mettant sur le côté», raconte Tanya Dietrich. Et «Farasi» se montre très habile dans cet exercice quotidien.
Sous d'autres cieuxRepu, il pourra commencer à réfléchir à son avenir un peu plus lointain en ruminant cette maxime de Casimir Delavigne: «La vie est un combat dont la palme est aux Cieux.»
A ce propos, le petit «Farasi» rêve sans doute déjà de partir sous des horizons plus accueillants, comme ceux d'Orlando (USA), de Madras (Inde), d'Hanovre ou de Gelsenkirchen (D) où s'ébattent désormais ses grandes soeurs.
Après tout, tant qu'il y a de la vie, et des gardiens bienveillants pour veiller sur son sort et lui chercher un asile, il y a de l'espoir.